Les mots surlignés font l'objet d'une note
1Reçue à Crest, le 29 avril 1573.
2Monsieur de Gordes, les affaires qui se presentent de votre costé m'avoient mis en plus grande
3peine que je ne suis à present, au moyen que vous continuez, ainsi que jay mesmes
4cogneu par voz dernières, à y pourvoir si bien et vertueusement quil ne se pourroit
5mieulx. Je suis très aize comme pouvez estimer que les villes et lieux dont me
6faictes mention, leur soient eschapées des mains et le serois encores plus si lon
7pouvoit apprehender les autheurs et principaux de ceste malheureuse rebellion,
8nommément ceulx qui avoient le plus doccasion de louer Dieu et se contenir doulcement
9en leurs maisons, joyssans de la grace faicte à eulx, indignes dicelle, ainsi que je
10voy maintenant à mon grand regret. Vous aurez veu par mes precedentes quelle
11est mon intention et dont je me confie en vous. Cest en premier lieu d'empescher et
12rompre leurs pernitieux desseings et graces à Dieu vous nestes destitué demoyens, de bon voulloir et advis pour continue a vous y conduire tressagement
13et avec valleur ainsi qu’avez desia fort advancé et principallement affin quil
14ne leur bienne secours de Genefve et Berne, Entre cy et la y aura moyen de
15vous pourvoir plus amplement si la necessité le requiert et donc ne fauldrez
16de m’advertir diligemment. Il est veritablement besoing user de la force des armes
17contre ceulx qui sont armez. Et quand ilz seront prinz user et exercer en leu endroict
18la justice et punition que les loiz et mes ordonnances veullenet, affin que par mesgarde
19et trop grande volonte de bien faire l’inocent ne soit meslé et chastié parmy le
20coulpable. Bien est madite intention que lon y procede vivement et ainsi quil apartient,
21ce que par votre prudence et le lieu que tenez pouvez considerer mieux que nul aultre.
22C’est enfin que jay parfaicte assurance et confiance en vous. Pour le regard des
23compaignies qui sont par dela qu’avez faict lever pour du tout n’habandonner la
24campaigne, j’ay aultant de bonne volonté qu’elles soient payees comme je veux croire
25elles feront bon debvoir et service, et que les avez bien choisies. Mais je suis contrainct
26de redire souvent que j’ay a satisfaire en infiniz endroictz et principallement en mes
27armees qui ne me permectent d’effectuer ma bonne volonté pour ceste heure, ny moins
28pour infinies considerations que vous mesmes pouvez estimer, accorder nouvel impost
29sur le sel, ny que l’on prenne les deniers de la subvention et fauldra adviser quelques
30aultres moyens plus commodes, faisant cependant payer lesdites compaignies comme elles ont
31esté et au mieux qu’il se pourra. Je n’ay donné occasion au prince d’Orange de
32permectre n’y a ses gens d’entreprendre aulcune chose contre mon service, et suis tresmarry
33de ceste ferniere faulte qu’ilz ont faicte de laisser courir sur vous ; et par ce escris
34bonne lettre a celluy qui y est de la part dudit prince, l’advisant en somme que si
35[71v°] de luy mesmes et sans commandement de son maitre, comme je veux croire, il en use et
36il en pourroit bien estre reprins et chastié. Et que si sondit maitre y consent, je
37feray pourvoir par les voyes et remèdes que de raison. Au demeurant, j’ay
38en très bonne part ce que me mandez pour l’archevesque d’Ambrun, la presence de qui
39me tesmoignez estre très necessaire et utille à mon service et au pays estans fort
40grandement respecté et honoré pour ses vertuz et merites ; et à ceste cause suis [ ?]
41de le tenir pour excusé du voyage quil estoit tenu faire par deca pour se rendre à
42lassemblee du clergé et quil demeure et semploye où il est allé pour mon service
43et le bien du pays. Mais estant icelle assemblée tant necessaire et pressée, il est
44besoing et sans aulcune faulte qu’il y envoye son vicaire general garny d’ample
45pouvoir et facultez requises en tel cas et pour representer le lieu de son archevesché.
46Je luy en escris ung mot que luy ferés tenir et ladvertirez encores de ce que je lui
47mande quil ne faille denvoyer incontinant et diligemment sondit vicaire in[ ?]
48et fondé comme il fault. Quand l’estat de mes affaires de dela et loccasion
49requerront que menvoyez ung gentilhomme ou aultre expres edt en diligence je y feray
50satisfaire et contanter raisonnablement. Priant dieu quil vous ayt monsieur de Gordes
51en sa sainte et digne garde, escrit a Fontainebleau le XXIIIe jour d’avril 1573.
52Charles
53De Neufville s[ecretair]e